1. Un jour de 1982-83 (vérif.), je reçus à la radio un coup de téléphone inquiet de Margarete S. Elle représentait un florilège de labels de disques pour la Suisse romande parmi lesquels I.R.S Records de Miles Copeland* (Cramps, etc.) qui avait signé The Lords Of The New Church, un super-groupe roublard (pop-punk) mais rock déglingue (punk-trash) formé en 1982 d'infréquentables ex : ex-Sham 69, ex-The Dead Boys, ex-The Barracudas et ex-The Damned en la personne de Brian James, guitariste à gueule de héros membre originel du band auteur du single New Rose qui alluma la mèche punk. 
    Margarete : "René, toi tu connais ces gens. Tu accepterais de me retrouver à la brasserie L'International où je les attends... Ce soir !" Sans hésiter, j'acceptai le rendez-vous. La bande à Stiv Bators donnait un concert au Cab de Genève/Les Avanchets** le soir ou le lendemain. A l'heure dite, je vis débarquer dans le restaurant ma Margarete en grande tenue Chanel - elle vivait dans un milieu chic et audiophile tendance musique classique - portant une boîte de bâtons en chocolat au kirsch et des couteaux suisses pour chaque membre du band. J'avais en face de moi les Lords Of The New Church en grande tenue all in black avec colliers en acier, bagouzes et foulards à têtes mort, illustration vivante du "Parents, voyez où mènent le rock'n'roll et la drogue !" Ce fut parfait. Je garde un très bon souvenir de Brian James qui se comporta ce soir-là en vrai gentleman britannique. Une autre mort irrégulière selon l'expression de Roger Nimier.

    * Le frangin du batteur de The Police.
    ** Les Lords revinrent pour un second gig au Palladium 2 ou 3 ans après. Je mélange un peu les souvenirs des deux concerts. Au Cab, Stiv avait une jambe dans le plâtre (!); au Palladium, il était valide. 

    Images : The Damned, The Lords Of... et Brian en smoking guy.

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  2.  

    C'est dans un numéro de Rock&Folk de 1973 (ou 74 ?) - quand le rock'n'roll redevenait dangereux - que j'ai découvert le nom de David Johansen* sous une photo des outrageuses New York Dolls, ce groupe scandaleux et improbable qui préfigura le punk. J'avais 15-16 ans et c'était quelque chose ! Les poupées maquillées comme des bagnoles volées allaient déchirer le rideau de complaisance du prog'rock qui transformait les salles de concert en vastes dortoirs enfumés. On retrouve David et les NY Dolls lors d'une captation télé à Londres en 1973. Ils exécutent (!) Personality CrisisPlay It Loud !

    Les membres originaux :
    David Johansen, Johnny Thunders, Sylvain Sylvain, Arthur "Killer" Kane et Billy Murcia.

    Le 28 février de cette année, David a rejoint ses vieux potes en enfer là où les rockers continuent à jouir de toutes les bonnes choses, du moins on l'espère.
    Martin Scorsese est un vieux fan des New York Dolls. Il a brillamment évoqué un moment de leur saga destroy et glam' dans l'épisode pilote étourdissant de la série Vinyl. Extrait choisi. Le réalisateur a également consacré un doc' à David.
    En 1982, Stiv Bators et les Lords Of The New Church, gravèrent un hommage aux poupées, le très enlevé 

    Et pour rebondir sur le commentaire de Debout, on n'oubliera pas l'alter ego de David, l'impayable Buster Poindexter que l'on retrouve dans cette vidéo avec Béatrice Dalle en guest star. Classieux comme on aime.

    10 mars : Je viens d'apprendre la mort de Brian James. J'ai envie de déposer les armes (soniques).

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  3.  
    Marianne

    J'ai ressorti l'excellent essai - ou est-ce une multi-biographie ? - de Fabrice Gaignault, Egéries sixties (Fayard et rééd. J'ai Lu) dans lequel on retrouve en tête de liste Marianne Faithfull. Pour évoquer celle qui fut l'égérie pop 60's assoluta, il avait rencontré Boris Bergman, le parolier fameux complice de Bashung et d'autres pointures et témoin capital des années 60 entre Londres et Paris. De Marianne, il dit qu'"elle était la diva de la bande (...) et un mix parfait de Gloria Swanson dans Sunset Boulevard et d'Edwige Feuillère dans La Folle de Chaillot." Il rapporte des caprices qui n'étaient jamais gratuits mais ciblés. Elle exigeait des choses improbables pour faire bisquer son producteur quand il lui mettait la pression... Production/pression/dépression. Elle avait déjà donné. Il ne fallait pas chercher Marianne. Certains l'apprirent à leurs dépends en deux réparties cinglantes. Et Bergman, toujours séduit, d'embrayer sur le présent. (Le bouquin date de 2006) : "Elle est proprement extraordinaire. C'est une femme qui écrit très bien, qui lit énormément. Elle est la première de toutes ces filles à avoir enregistré avec Gainsbourg. (...) On peut lui écrire des textes d'homme, elle aime ça. (...) Marianne, Nico et Zouzou, on pourrait les mettre dans la catégorie femmes belles de partout."

    At the age of 37

    She realised she'd never ride

    Through Paris in a sports car

    With the warm wind in her hair

    And she let the phone keep ringing

    As she sat there softly singing

    Pretty nursery rhymes she'd memorised

    In her daddy's easy chair

    Si elle n'a pas créé la ballade de Lucy Jordan, elle l'a incarnée.

    En 1979, Broken English, ce chef-d'œuvre, était un disque de chevet. Notre Marianne revenait du pays des ombres; elle savait l'art de la reprise. Sa voix avait... mué. Mutante after punk, elle n'était pas encore sortie de la grande blanche mais elle était dessalée, bientôt affranchie. Une grande dame fracassée et réinventée. Nous étions amoureux de cette superbe trentenaire. On suivit sa rédemption. En 2010, elle nous proposa avec élégance et gravité sa version de Stations de Mark Lanegan et Greg Dulli.

    So Long So Alone

    Les allées du cimetière pour15minutes sont plus habitées que les navrantes têtes de gondole actuelles. Je crois que j'ai besoin de souffler et d'un verre. A plus loin.

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  4. Une séquence captures d'écran de Radio On (1979) de Christopher Petit, un des films culte de ma génération. Ce road movie fascinant entre fatigue - dépression ? - fitzgeraldienne* et sublimation moderniste façon Kraftwerk offrait aussi un état des lieux moral et esthétique pour ceux qui eurent 20 ans (+/-) à l'époque. En 2009, le réalisateur britannique reprit certains plans de Radio On dans son nouveau film initiatique Content, un Objet Filmé Non Identifié (OFNI) que j'ai alors découvert dans un état proche de la sidération. A travers sa mise en abyme, l'ancienne magie opérait toujours.

    Si vous grattez un peu, vous retrouvez aisément Radio On sur un site russe en v.o. Quant à Content, il est disponible sur YouTube.
    Je reviens avec quelques pistes sonores.

    Mister Cale est un génie in rock.

    * Ives Arnold aurait parlé de contemplation morose.

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  5.  

    Portrait Of Space par Lee Miller

    Un soir de spleen amer je découvre He'd Be A Diamond, une merveille interprétée live pour BBC Scotland par The Teenage Fanclub, un groupe fier et discret comme je les aime. J'entends dans leur prestation l'influence de Gene Clarke des Byrds et une poignante nostalgie. Je creuse un peu l'affaire et j'apprends qu'il s'agit d'une reprise habitée d'une composition de The Bevis Frond dont les paroles du meneur Nick Saloman m'explosent le cœur. Le groupe existe depuis... 1986 !

    Je vous mets les lyrics :

    When the tape runs out, the music keeps playing,

    And when the walls come down, it`s still hard to cross the line,

    And when his love is gone, he says he still needs her,

    And he wants to let you know,

    That if he had his chance again, he`d be a diamond.

    When you dab your eyes, the tears keep on falling,

    And when you blow your nose, it still gets blocked up and runs,

    And though you feel like shit, he says you look beautiful,

    And he swears by all the saints,

    That if he had his chance again, he`d be a diamond.

    Is he lying to get what he wants, or does he mean it this time?

    Is he running low on affection, and beer and dope,

    And an ironing board?

    And an unpaid analyst who shags?

    When you turn your back, you still see what`s behind you,

    And when you start afresh, you still think of days gone by,

    And when a heart is broken, it still goes on pumping,

    And he told me just last night,

    That if he had his chance again, he`d be diamond.

    Et pourquoi ce cliché pris par Lee Miller ? Aucune explication logique, peut-être une envie de désert.

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  6. La troublante Hilde Krahl (1917-1999) redécouverte grâce à l'essai passionnant d'Isabelle Mity, Les actrices du IIIe Reich - splendeurs et misères des icônes du Hollywood nazi (Perrin, 2022) dont j'ai repris quelques passages ces jours-ci. Comme le souligne l'historienne, si sous le IIIe Reich certaines déesses de l'écran d'argent incarnèrent effectivement l'idéal nazi de la femme aryenne, les stars que furent Zarah Leander, Olga Tchekhova, Sybille Schmitz ou encore Hilde Krahl étaient loin de correspondre aux canons esthétiques imposés par celui qu'on surnommait le bouc de Babelsberg ou le nain priapique, Joseph Gœbbels. Brunes, typées - Hilde Krahl, par exemple, était d'origine croate - à la sensualité ambigüe, ces créatures du cinéma nazifié contrastaient avec la fadeur des blondes Mädchen mises en avant par la propagande. Gœbbels lui-même vécut une passion torride pour Lída Baarová, une ravissante actrice tchèque qui faillit faire capoter son mariage. Hitler intervint et ordonna à son ministre de rompre cette relation adultère. Gœbbels vécut alors une période de dépression amoureuse. Le très mais pas tout puissant* ministre de la propagande était un cinéphile averti et un amateur de starlettes qu'il harcelait jusqu'à faire enlever celles qu'il voulait mettre dans son lit en menaçant de briser les carrières de celles qui auraient osé lui résister. Certaines ne cédèrent pas. 
    Après la guerre, on a pu voir Hilde Krahl jusque dans les années 90 sur les grands et les petits écrans. Elle fut distribuée - entre autres - dans l'inépuisable série Inspecteur Derrick.

    * Dans le IIIe Reich, le ministre de la Propagande avait de puissants rivaux : Himmler, Gœring, Ribbentrop que le Führer - lui-même cinéphile - savait mettre en concurrence en imposant in fine ses ordres.

    ***
    Sans lien direct.
    Depuis le début de ce blog, j'ai aimé jongler avec les époques, les ambiances et les sons. Ma curiosité pour les musiques pop/rock m'a conduit vers un titre live du band américain Lo Moon. (L.A.) Dans cette composition, j'entends des échos de Talk Talk ou de The War on Drugs. Ils seront en concert à Paris le 12 novembre au Badaboum.

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  7.  

    Et n'oubliez pas ceci : si vous êtes dans les musées

    et dans les livres d'histoire, nous aussi nous y serons.

    Nous serons votre lumière invisible et contraire.

    Et si vous nous méprisez, sachez que pareillement, nous

    vous méprisons. Nous serons ainsi vos égaux.

    Mirwais...

    ... En exergue à son remarquable récit Taxi Girl - 1978-1981 dont il fut le cofondateur et le guitariste. C'est le volume I d'une trilogie annoncée et l'un des grands livres rock en français de ces vingt dernières années. C'est publié chez Séguier, une maison qui ose parier sur des manuscrits singuliers. Le livre a (déjà) quelques mois ? Ho ho, la belle affaire ! Il se trouve que votre serviteur a pour habitude de lire les bouquins dont il vous cause ici. Il refuse d'alimenter l'hystérie consumériste qui abîme aussi le monde l'édition où on envoie au pilon des titres qui n'auront eu aucune chance de trouver leurs lecteurs.

    Je profite de cette mise au point pour dire que j'apprécie le récit autobiographique d'un autre homme de ma génération, Perdu pour la France de Patrick Eudeline dont je termine la lecture, également paru chez Séguier. J'y reviendrai dans le billet consacré à celles et ceux de ma génération qui eurent 20 piges entre 1976 et 1980 et qui nous laissent des Mémoires.

    Ces jours, je réécoute Mannequin, un titre "too much too soon" qui mit brièvement Taxi Girl en orbite. Son succès doit beaucoup aux claviers inspirés de Laurent Sinclair. Le romantisme moderne et noir + la Kraftwerk's touch : un standard de l'europop que cherchaient - en vain ? - de jeunes et moins jeunes gens à l'époque. (JJ Burnel des Stranglers)

    (Photo Taxi Girl : Pierre-René Worms)

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  8. On dit d'Earl Slick qu'il est flamboyant, arrogant - traduire : il connaît sa valeur -, surdoué à la guitare six cordes et surtout qu'il est resté un homme libre. Dans l'histoire du rock, c'est LE sideman - ou accompagnateur majeur. Bowie lui doit les parties de guitares sur quelques unes de ses grandes compositions, Lennon aussi. En studio et sur la route, Earl tenait son rang : première gâchette au service des maîtres, ses employeurs furent parfois aussi ses amis même s'il a toujours su qu'il y a autour de la star un cercle invisible et sacré à ne jamais franchir au risque d'exclusion. Earl "goldfingers" est le fil conducteur de l'excellent documentaire Rock 'n' Roll Guns for Hire: The Story of the Sidemen (pour la BBC) de Francis Whately, un film qui va à la rencontre des sidemen & women, ces musiciens formidables accompagnateurs qui ont fait le rock et le funk dans le seconde moitié du XXe siècle, frôlés par la gloire tout en sachant rester anonymes... ou presque. Ce beau film leur rend hommage. Avec un casting de première et des archives impressionnantes.

    Note : J'ai trouvé le lien grâce à la recension du doc' parue dans le numéro d'octobre du vénérable mais toujours indispensable Rock&Folk.

    Photo de Earl Slick (fragment) : Chuck Lanza
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  9. Bon dimanche

    Jeudi 12 septembre 
    J'avais envie de sons et d'images qui me caressent dans le sens du poil. Ces deux "Louise", l'actrice et la composition de Mister Harvey - ex-claviers et arrangeur/chef d'orchestre des Bad Seeds de Nick Cave - répondent à cette exigence donc je partage.

    "Et si"... Une vie c'est (aussi) une suite de "et si" suivis des deuils qui accompagnent les choix morts-nés. Certains sont lourds à porter; d'autres incitent à la bienveillance. C'est un des thèmes - il y en a d'autres - du formidable roman de Patrice Jean La vie des spectres édité Au Cherche Midi. Depuis ma découverte de L'homme surnuméraire, je prête systématiquement les livres de cet écrivain subtil qui ne passe rien à son époque incertaine et rude aux âmes inquiètes où l'idéologie du Bien a phagocyté la Justice et a fait de nous, ceux et celles d'avant, des spectres. On en recausera, peut-être. En attendant, lisez cet auteur important dont les livres réunissent les trois exigences artistiques : incarnation, transcendance et verticalité.
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  10. Enfourcher sa Motosacoche, tailler la route. Roger Nimier affirmait que rien ne vaut une pointe de vitesse pour affiner les sentiments. Laisser loin derrière les scories, les mensonges et les trahisons - petites, misérables, procédurières - qui empuantissent l'air de cette ville très moyenne. Un programme : dissidence et chemins de traverse.
    Quand le temps sur Genève devient trop lourd, il faut dégager. Pour ça, rien ne vaut un séjour marin ou alpin. Le grand large - plein Ouest - ou l'altitude - les hautes Alpes - pour évacuer les miasmes répandus par de vieux adolescents aigris et ratés, ces pétochards sans talent qui jalousent les compétences de ceux qui ont réussi leur vie. 
    Oui, je suis vraiment bien à la retraite.

    I'm Moving On par John Kay
    &
    Run Run Run par The Gestures

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