1.  

    J'ai aimé et j'aime encore tout ce qui séduit, emballe et parfois déséquilibre et déroute. Dans le désordre, les musiques fortes, les belles femmes, l'opium, les Ecrivains, les îles, l'Art Nouveau... Devenu vieux, je tiens ma ligne. Comme l'a écrit Guy Debord, le léopard meurt avec ses taches et je n'ai pas la prétention de m'améliorer. (De mémoire) Parvenu à la retraite, je suis détaché sans être un déserteur : je me sens inactuel, voilà. Inactuel comme les merveilleux Croquis de mémoire de Jean Cau* que je vous conseille sans réserve quelque soit votre sensibilité idéologique. C'est un vrai livre d'écrivain. Sous sa plume formidable, on retrouve Hemingway, Malraux, Cocteau, Mitterrand, Carson McCullers, de Gaulle, Camus, Giono, Aragon, Faulkner... Ses croquis de haute époque sont empreints d'une poignante mélancolie piquetés de vacheries pleines de tendresse façon Cau. Un des plus fins et émouvants ? Celui qu'il consacre à son ancien patron, Sartre, où résonnent les échos de l'ancienne fraternité. A glisser sous le sapin d'un être aimé à Noël.
    On se retrouve après les fêtes. 
    Hasta la vista ! 

    * Réédités dans La petite Vermillon/La Table ronde.
    ** Je ne fume plus, je vapote. Vapoter, ce verbe mou et un peu misérable. Repenti ? Hum... Je n'aime pas cette appellation. Je dirais plutôt retiré. Retiré des drogues dures, oui. Dures, douces... C'est relatif vu le taux de THC contenu dans certains produits extraits du chanvre aujourd'hui. Quant à l'alcool, cette dope occidentale qui assomme trop vite ses adeptes, je trouve ses effets, directs et collatéraux, vulgaires. 
    (A développer)

    Note du 6 déc. 
    Ma compagne m'apprend qu'elle a enduit son visage d'un - je cite -"sérum repulpant". Que dois-je faire de cette info ?

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  2. La troublante Hilde Krahl (1917-1999) redécouverte grâce à l'essai passionnant d'Isabelle Mity, Les actrices du IIIe Reich - splendeurs et misères des icônes du Hollywood nazi (Perrin, 2022) dont j'ai repris quelques passages ces jours-ci. Comme le souligne l'historienne, si sous le IIIe Reich certaines déesses de l'écran d'argent incarnèrent effectivement l'idéal nazi de la femme aryenne, les stars que furent Zarah Leander, Olga Tchekhova, Sybille Schmitz ou encore Hilde Krahl étaient loin de correspondre aux canons esthétiques imposés par celui qu'on surnommait le bouc de Babelsberg ou le nain priapique, Joseph Gœbbels. Brunes, typées - Hilde Krahl, par exemple, était d'origine croate - à la sensualité ambigüe, ces créatures du cinéma nazifié contrastaient avec la fadeur des blondes Mädchen mises en avant par la propagande. Gœbbels lui-même vécut une passion torride pour Lída Baarová, une ravissante actrice tchèque qui faillit faire capoter son mariage. Hitler intervint et ordonna à son ministre de rompre cette relation adultère. Gœbbels vécut alors une période de dépression amoureuse. Le très mais pas tout puissant* ministre de la propagande était un cinéphile averti et un amateur de starlettes qu'il harcelait jusqu'à faire enlever celles qu'il voulait mettre dans son lit en menaçant de briser les carrières de celles qui auraient osé lui résister. Certaines ne cédèrent pas. 
    Après la guerre, on a pu voir Hilde Krahl jusque dans les années 90 sur les grands et les petits écrans. Elle fut distribuée - entre autres - dans l'inépuisable série Inspecteur Derrick.

    * Dans le IIIe Reich, le ministre de la Propagande avait de puissants rivaux : Himmler, Gœring, Ribbentrop que le Führer - lui-même cinéphile - savait mettre en concurrence en imposant in fine ses ordres.

    ***
    Sans lien direct.
    Depuis le début de ce blog, j'ai aimé jongler avec les époques, les ambiances et les sons. Ma curiosité pour les musiques pop/rock m'a conduit vers un titre live du band américain Lo Moon. (L.A.) Dans cette composition, j'entends des échos de Talk Talk ou de The War on Drugs. Ils seront en concert à Paris le 12 novembre au Badaboum.

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  3.  

    J'aime ces embrassements des siècles, noces du légendaire et du dogmatique, ces rondes mêlées de saints chrétiens et des ombres saturnales. Les hommes du siècle 21, le mien, sont passionnés par la discorde. Ils font des choix. Ils réduisent les chatoiements. L'amour de la dialectique a créé chez mes semblables une pensée de hachoir et des réflexes de charcutier: on tranche. Soit l'un, soit l'autre. Moi, je veux les deux puisque j'aime les fées. Il y a une façon d'attraper le monde et d'y déceler le miracle. Le reflet revenu du soleil sur la mer, le froissement du vent dans les feuilles d'un hêtre, le sang sur la neige et la rosée perlant sur une fourrure de bête : là sont les fées. 

    Sylvain Tesson

    (Merci à Anne et à Alexis pour cette belle citation.)

    Petite note :
    Sylvain Tesson est un écrivain important dans l'époque car ses bouquins initient à la poésie et au voyage des individus d'une génération dont la perspective à priori était de passer quarante ans de leur vie le cul vissé sur une chaise, les yeux plongés dans un écran, leurs rêves anéantis par les structures déprimantes et l'ambiance délétère du secteur tertiaire. (Comm', services, e-banques, assurance, médias mous, etc.) Grâce à lui, des gars et des filles de la génération de mon fils ont lu que l'Aventure restait possible. Rien que pour ça, un grand respect. 
    L'écrivain voyageur sera l'invité d'une prochaine édition de l'émission Helvetica sur la RTS.
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  4. Il y a quelques nuits, dans un documentaire consacré au cinéaste Daniel Schmid, je revois des images de La Paloma qu'il réalisa en 1974 avec son actrice préférée, la diva Ingrid Caven. Cette brève séquence m'émeut beaucoup. Après toutes ces années, elle me trouble encore en m'offrant une passerelle entre des artistes qui comptent toujours dans ma vie de cinéphile/audiophile parvenu à l'automne des passions. Ingrid Caven est aussi le titre du roman qui permit à son compagnon Jean-Jacques Schuhl d'obtenir le prix Goncourt en 2000. Ecrivain culte mais lauréat improbable, on dit que Philippe Sollers joua de toute son influence, alors très importante, dans le Paris littéraire pour lui obtenir ce prix. Mais on dit tant de choses. J'ai envie de relire Schuhl. Je parcours les étagères de ma bibliothèque... Romans français... S... Voilà : quatre titres de Jean-Jacques Schuhl sur les six volumes édités en un demi-siècle. Dans cette mince bibliographie - mince mais essentielle -, il y a un recueil éblouissant de nouvelles qui sont autant de subtils polaroids captés par l'auteur lors de promenades (ou d'errances ?) dans le Paris d'avant. Ecoutons sa petite musique avec ces lignes de Voici venir les temps...*
    Ça s'en va et ça revient comme dans la chanson. Les sons et les parfums tournent dans l'air du soir... Air du soir ?... Pourrais vendre ça à Nina Ricci peut-être, c'était d'elle Air du temps il y a longtemps... des lustres... La poésie, les mots circulent ainsi... comme une essence, vaporisés, dans le soir incertain. Je vois les mots surgir l'un après l'autre, et puis ensemble, fragmentés, mobiles.

    Trop rare, je vous dis.
    A plus loin

    * Jean-Jacques Schuhl, Obsessions, Nouvelles, L'Infini/Gallimard, 2014.
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  5. Quand je vous écoute, importants d'aujourd'hui, il me semble réentendre, pour mon plus grand cauchemar, ceux dont la palabre a tellement pollué les années soixante et soixante-dix. Même mépris des faits, même forçage du réel, même invocation de pseudo-sciences et de lois nébuleuses, même aptitude à bâtir des édifices ex nihilo, même novlangue en état d'ébriété. J'allais ajouter, un peu vite : même simulacre. Mais tant s'en faut. Car il s'agit d'une puissance entièrement revue et corrigée, qui a su tirer les leçons du fiasco de sa cadette. Une puissance qui se vante d'en avoir fini avec les vieilles idéologies, alors qu'elle reconduit sans vergogne le fantasme inhérent à toute idéologie : l'absorption intégrale du réel par le discours - ou plutôt l'engloutissement et la régurgitation du réel par des mots qui ne sont plus des mots. Puissance d'autant plus redoutable qu'elle s'avance immaculée, vierge des complications et des contradictions d'une Histoire dont tout le monde est fatigué ou censé l'être. Puissance de la non-pensée, que rien ne peut plus attaquer ni réfuter par aucun côté. 

    Pierre Mari, En pays défait, éditions Pierre Guillaume de Roux, 2019
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  6. Le plaisir de partager une belle image comme celle de Molly Peters dans le miroir. Je me suis donné les moyens de réunir les trois luxes rares que j'associe à la nuit : l'espace, le temps et le silence. Mon quartier pourtant situé en pleine ville est si paisible la nuit qu'une invitée vivant à la campagne m'a dit qu'il était plus tranquille que sa résidence située près des champs. Dès 23h, tout s'apaise et la nuit peut s'ouvrir. Elle m'offre son temps entre parenthèses. Je profite de cette respiration pour lire des textes qui exigent une concentration minimale. Il y a quelques temps, j'avais annoncé sans promesse de date une recension des livres qui ne me sont pas tombés des mains ces derniers mois. J'y travaille (si si !) à un rythme plutôt paisible pour intégrer les nouveautés et les rééditions. J'adopte le rythme du marcheur qui était celui d'un infatigable piéton de Paris, l'irrésistible chroniqueur de l'Esprit de Paris, Léon-Paul Fargue, dont les éditions du Sandre viennent de publier le premier volume des œuvres complètes. Au final, trois tomes sont annoncés. Il va falloir intégrer à ma prochaine recension ce beau livre qui rassemble l'intégrale des chroniques parisiennes, une édition établie et annotée par Barbara Pascarel. En cette période d'agitation médiatique aussi frénétique que contre-productive - on n'apprend pas grand'chose et on se méfie du reste -, j'essaie de tenir le cap à bord de mon vieux rafiot (virtuel) baptisé le Rien Ne Presse. Cela dit, à plus loin.
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  7. En 2001, sous le titre-missile L'Occident meurt en bermuda Philippe Muray réglait son compte au tourisme dans une chronique formidable*. Extraits :
    De toutes les entreprises de dévastation de notre temps, le tourisme est la plus encensée. Tandis que sa conquête se poursuit à marche forcée, l'industrie touristique et ses innombrables prédateurs appointés (tours-opérateurs, hôteliers de loisirs, directeurs et rédacteurs de guides, etc.) ont inventé de se protéger de toute critique en montant en épingle ce mouton noir, ce monstre, cet ogre hideux et providentiel qu'on appelle le touriste sexuel. Et plus celui-ci sera chargé de péchés, plus le touriste "normal" apparaîtra innocent. Il passera même pour un croisé des droits de l'homme, et comme l'incarnation déambulante de la conscience éthique. En d'autres termes, le touriste sexuel est un salaud utile : il sert à blanchir le cauchemar du tourisme normal et à légitimer ses vastes exactions. Les petits et grands tartuffes du "voyage respectueux de l'autre" ou du "tourisme responsable" ont besoin de ce suppôt de Satan modernisé pour retourner leurs destructions en exploits humanitaires. Comme le déclarait il n'y a pas si longtemps un orfèvre en la matière, le directeur des Guides du Routard, "la seule chose qui se vend bien c'est la morale, et il faut aller très loin là-dedans."

    Après une lecture fine du roman Plateforme de Houellebecq - prétexte à l'affaire - Muray écrivait :
    S'il y a bien un scandale dans ce roman, celui-ci consiste à faire avouer au tourisme, transformation brutale du globe terrestre en marchandise, l'obscur secret que ses entrepreneurs camouflent sous les balivernes d'une vertu d'emprunt : toute forme de tourisme est sexuelle parce que le tourisme est par définition occidental et que l'Occident contemporain agonise dans un épuisement libidinal absolu. Les Occidentaux, comme dit le narrateur du livre, n'arrivent plus à coucher ensemble. Leurs femmes seraient même incapables d'être des prostituées thaïes. Elles ne leur arrivent pas à la cheville. L'Occidental, explique-t-il encore, a de l'argent mais plus aucune satisfaction sexuelle. Dans d'autres pays, en revanche, vivent des milliards d'individus qui n'ont à vendre "que leur corps et leur sexualité intacte". (...) Dans ces conditions, l'appel au "tourisme respectueux" et aux "voyages éthiques", ainsi que la guerre contre le tourisme sexuel, ne sont même pas des marques d'un néo-puritanisme : ce sont des volontés délibérées de mettre en place une fausse conscience destinée à promouvoir l'identification de l'industrie touristique avec les plus hautes exigences de la morale afin de cacher que cette industrie est par définition coupable. Cette fausse conscience a une autre fonction, solidaire de la première. Elle permet de masquer ce que le roman de Houellebecq dévoile : l'agonie de l'homme européen. Le symptôme le plus sûr de cette agonie réside dans une des activités les plus encouragées : le voyage. L'homme européen souhaite voyager. On a réussi à la persuader qu'il veut voyager. Il n'a d'ailleurs pas le choix : en Occident, comme le dit le héros de Houellebecq, il fait froid, la prostitution est de mauvaise qualité, il est devenu impossible d'y fumer en public et d'y acheter des médicaments ou des drogues. Pour de multiples raisons la vie a fui l'Occident. Et le processus est irréversible : on ne change pas un continent qui perd, on ne peut qu'essayer de la quitter. 
    Les touristes, même s'ils ne le savent pas, ne désirent ni admirer des ruines pittoresques ni participer à des divertissements qui portent des noms teintés d'un humour noir atroce : "circuits aventure", "moments magiques", "soirées contact". Ils ne cherchent qu'à se transfuser du sang frais. En pure perte, d'ailleurs, tel est le véritable univers de l'horreur touristique, l'ultime comédie humaine où les trépassants s'agitent en bermuda.

    Dans la nuit du nouveau monde-monstre - Exorcismes spirituels III - éd. Les Belles Lettres

    *A l'occasion de la parution du roman de Michel Houellebecq Plateforme.
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  8. Lea Massari, son magnifique regard tragique, et Alain Delon dans L'Insoumis réalisé par Alain Cavalier en 1964. (Est-ce qu'il existe un coffret de l'œuvre de ce cinéaste rare ?*) Les deux acteurs se retrouvèrent sur le tournage du Professeur de Valerio Zurlini l'année 1972. Nous sommes quelques uns à penser qu'il s'agit sans doute de l'un des meilleurs rôles de l'acteur français.
    Evoquant le possible contact furtif - un regard échangé - entre Mireille pas encore Darc et Alain pas encore connu - dans foule à Toulon en 1953, Jean-Marc Parisis écrit :
    On croit rencontrer des personnes par hasard sans savoir qu'on honore un rendez-vous fixé par un regard des années avant.
    Le style est au rendez-vous d'Un problème avec la beauté - Delon dans les yeux, Fayard. (2018)

    Quand le gros chien noir vient renifler mes bottes, je trouve refuge dans les reflets et les échos du monde analogique avec ses mystères**, ses secrets et ses portes dérobées parce qu'il offre encore aux plumes talentueuses un champ romanesque tragique et glamour, deux exigences absentes du miroir aux alouettes numériques de la littérature mondialisée. Nostalgie, mélancolie... Oui, et alors ? La littérature que j'aime est celle du temps perdu puis retrouvé.

    * L'insubmersible Ciné-club de FR3 devrait proposer un cycle des premiers films d'Alain Cavalier. Ainsi, on pourrait découvrir ou revoir Le combat dans l'île avec Romy Schneider et Jean-Louis Trintignant, L'Insoumis, Mise à sac ou La Chamade avec la reine Catherine.

    ** Les caméras vidéo installées dans les studios de radio sont une aberration. Outre qu'elles défigurent les animateurs pas maquillés et apprêtés pour l'exercice, elles empêchent l'auditeur d'imaginer et de fantasmer. Si j'ai aimé puis pratiqué ce média, c'est parce que certaines voix m'avaient fait rêver durant l'adolescence. Là aussi, on nous prive du mystère, on liquide le secret.
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  9. Vous le constatez, on patauge chaque jour davantage dans la "judiciarisation" de tout et de tous*. En mars 2002, Philippe Muray pointait déjà cette étonnante manie, pressentant qu'elle allait devenir dangereusement liberticide. C'est fait. Voici ce qu'écrivait l'étincelant pamphlétaire dans Nouvelles frontières, une chronique pour l'édition dominicale de La Montagne :

    "Que devient l'homme ?", demandait Alexandre Vialatte ici même dans les années 60 ; autrement dit au Pléistocène. Et il répondait : "On le trouve dans les foires. Il y vend de la barbe à papa."
    Ces temps frivoles sont révolus. L'homme, depuis, s'est découvert des passions plus consistantes que la barbe à papa. L'homme s'ébroue dans le droit. L'homme aime le droit. Il l'interroge, le harcèle, le presse comme un citron. Et quand il a fini, il recommence. L'homme se livre à de savoureuses batailles de procédure. Qui débouchent sur de nouveaux droits. Lesquels entraînent de nouvelles surveillances. De nouveaux délits. De nouvelles sanctions. Le tout à un rythme endiablé. Il s'agit sans cesse de "se mobiliser". De "déchirer le voile du silence". De "lever un tabou". De "briser l'hypocrisie des conventions publiques". Cette quête est sans fin. C'est le roman du nouveau monde : il a l'avenir pour lui. Les civilisations peuvent être mortelles, pas les avancées législatives. 
    Propulsé dans une aussi grandiose épopée, que fait encore l'homme ? Il ne s'arrête plus. La chicane est un challenge. Et les nouvelles frontières à conquérir sont innombrables.

    in Causes toujours, éd. Descartes & Cie/La Montagne, 2013


    Lire, relire Muray est indispensable à mon équilibre psychique et biologique. Il y a en permanence un de ses livres à portée de main. Sa vision décapante de la société postmoderne est servie par un style sans égal où explosent les grenades de son rire à fragmentation.


    * L'autre tendance lourde est la descente de police opérée dans des œuvres littéraires, picturales et musicales au nom du Bien. A Florence, on modifie la fin de Carmen de Bizet pour ne pas offenser les femmes qui jusque-là ne trouvaient rien à redire au dénouement de l'opéra - à noter que la décision à été prise par deux hommes... -, en France on efface des accessoires hygiéniquement incorrects intimement liés à des personnages populaires (la clope de Sartre, celle de Gainsbourg et le bâton de Lucky Luke) et demain on réécrira Lolita si on ne parvient pas à en faire interdire la réédition. On effacera des séquences de certains polars où on fume trop. Mais il y a mieux, plus responsable, plus citoyen et surtout moins directif : l'autocensure, ce petit agent de répression à demeure dressé en chien de Pavlov qui réagit au moindre signe d'un écart possible, d'une dérive supposée, d'une dissidence esquissée... pour notre bien, encore et toujours. Dès lors, plus besoin de censure. C'est formidable. L'air devient irrespirable mais les médias mainstream et les institutions culturelles ne bougent pas, au contraire. (Il ne faut jamais oublier que ces milieux sont peuplés de donneurs de leçons et de commissaires d'Etat délégués à la rébellion institutionnelle.) A ce propos, le silence assourdissant des éditorialistes et des cadres culturels, pourtant en pointe dès qu'il s'agit de dénoncer, revendiquer et exiger des droits et des lois, est édifiant.
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  10. A de trop rares exceptions comme le remarquable Salut à Jacques Rigaut publié dans le N° 57 en octobre 2004, La Nouvelle Revue Française n'est plus la brillante dame indigne de la littérature qui me faisait rêver. En revanche, je fréquente avec assiduité La Revue Littéraire aux éditions Léo Scheer. Son numéro 69 d'août, septembre et octobre (2017) m'a permis de découvrir les aphorismes de Clément Bosqué dont voici une petite sélection parfaitement subjective.

    La modernité a fait de la poésie une chose invendable et minuscule.

    *

    Il y a des horaires pour la tristesse. Moi, c'est plutôt vers 15 heures.

    *

    Dans la rue, un passant me lance, atrocement indigné : "la jeunesse française s'habille en vieux !" Certes, avec costume, chapeau et boutons de manchettes, je porte haut la provocation. Dans le fond, ces mots étaient un compliment.

    *

    La politique est l'obsession maladive de vouloir pour les autres.

    *

    Etre écrasé par la splendeur.
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