... Bande de Shadoks ! (1968-2018)
J'avais dix ans quand les bestioles improbables débarquèrent dans la boîte aux images qui bougent. Sous la république gaullienne, la télévision était surveillée et encadrée de près par les représentants de l'Elysée aussi l'irruption des Shadoks fut un événement national et même trans-national. Que Jacques Rouxel et sa bande de graphistes surréalistes aient conçu la série pour la boîte de production aaa (animation art graphique audiovisuel), c'était déjà pas banal, mais que le directeur des programmes de l'époque - André Voisin a droit à notre reconnaissance éternelle -, enthousiasmé par le projet, ait pris le risque de le diffuser juste avant le Journal télévisé du soir, tenait du pari suicidaire sur le plan professionnel. La suite appartient à l'histoire de la télé. Les créateurs des bestioles réussirent le grand écart entre les délires pataphysiques et les exigences d'audience populaire d'un média en pleine mutation. Les Shadoks, c'est la culture pop et populaire française à son meilleur.
A noter encore l'audace dans le choix du compositeur de la bande-son. En faisant appel à Robert Cohen-Solal qui travaillait au sein du service de la Recherches de la radio-télévision française, Rouxel prenait un autre risque, celui d'une partition ésotérique mais ce pionnier de l'électro-acoustique eut l'intelligence de mettre son talent musical au service de l'ensemble, participant ainsi à la création de l'identité très forte de la série. On ajoute le commentaire lu par l'irremplaçable et fabuleux Claude Piéplu et on obtient ce que peut offrir de mieux une télé de service publique intelligente.
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