Sans bilan ni best of - c'est pas le genre de la maison -, je me laisse glisser en pente douce vers la fin de cette année difficile. Je relis quelques pages de Huguenin dans son "Journal"* étourdissant, un peu de Muray - aussi pour sa mauvaise foi, Cioran pour l'intelligence fulgurante et Philippe Garnier pour le plaisir d'une mélancolie réactive. J'écoute des classiques entre lesquels s'est glissée hier la dernière compilation de
Rock&Folk* qui me fait craindre le pire pour les saisons à venir, et le pire dans le rock et la pop, c'est l'
ennui causé par les redites, l'ersatz et l'embaumement vivant. Dans la dernière sélection du mensuel, je sauve Noel Gallagher dont l'extrait proposé sous la double influence des Fab Four et des Kinks donne envie de découvrir l'album solo et Hanni El Khatib encore un peu brouillon mais doté d'un vrai talent de songwriter. (Ray Charles qui figure sur le CD est hors classement.)
- Au sommaire du N° de janvier 2012: The Black Keys, R.E.M., The Kills avec la troublante Alison, Wilco, Pete Best et Tony Sheridan, ces presque Beatles qui ont raté le train vers la gloire et Mister John Cale auquel Eudeline rend un hommage distingué dans un papier inspiré.
* La biblio de Jean-René Huguenin ne compte que deux titres: un premier - et unique - roman brillant
La Côte sauvage et son
Journal, une bibliographie interrompue par la mort violente du jeune écrivain en bagnole comme Nimier et Camus. Dans sa préface au
Journal (posthume), un François Mauriac inconsolable écrivait:
Si Jean-René Huguenin avait vécu, si le temps avait été donné à l'auteur de "La Côte sauvage" pour écrire l'œuvre que ce premier livre annonçait, et si, vers sa cinquantième année, il avait retrouvé ce manuscrit au fond d'un tiroir, il en eût été peut-être irrité; il ne l'aurait pas publié sans ces commentaires dont nous accablons volontiers la jeunesse et que n'épargnons pas au jeune homme que nous fûmes. Mais dans la lumière de sa mort, ces pages ont pris un aspect bien différent. Presque chaque parole en est devenue prémonitoire. Cette danse que la jeunesse mène volontiers autour de la mort, cette coquetterie funèbre nous eût lassés, peut-être, si la mort n'avait été fidèle au rendez-vous. Mais elle a répondu à l'appel. Alors la densité de chaque mot a changé d'un seul coup. Et nous nous penchons aujourd'hui sur une œuvre qui ne ressemble plus à ce qu'eût été le Journal d'un jeune homme, retrouvé et publié au temps de sa maturité et de sa gloire. Ce Journal a la lividité de l'éclair: le coup va frapper d'une seconde à l'autre. Il a frappé; et voilà ce qui nous reste de l'auteur de La Côte sauvage. Rien ne nous viendra plus de lui.
Le
Journal a été édité par les éditions du Seuil en 1964 et réédité en Points/Seuil.
Photo (source Rock&Folk): John Cale par Keith Morris période
Slow Dazzle avec sa bouleversante version de
Heartbreak Hotel et
Helen Of Troy, les albums qui m'ont initié à la double carrière du musicien au milieu des 70's.
Afficher les commentaires